Paroisse de la Bonne Nouvelle

La liturgie – « Pour un souffle nouveau »

Le11 mars 2020, toutes les personnes intéressées par le service de liturgie étaient invitées à une rencontre paroissiale en préparation au temps pascal. A cette occasion, le Père Mickaël est intervenu pour resituer le sens de ce service ; voici une partie de son intervention.

En m’adressant à vous ce soir, je souhaite vous parler non comme un chef d’entreprise, ni un maître d’école, ni un père de famille, mais d’abord comme un frère à ses frères et sœurs baptisés, adultes et responsables. Je le fais aussi comme votre curé – celui qui est chargé de prendre soin (cura) – en vertu de la mission qui m’a été confiée d’être votre pasteur.

L’objectif de notre rencontre, dans la suite du travail déjà entrepris depuis plus d’un an par la commission liturgie, est de faire un pas de plus dans la croissance de notre paroisse (notre paroisse de la Bonne Nouvelle est encore jeune, elle n’est que dans sa 2e année d’existence). Je perçois bien les petites crispations, incompréhensions, tensions qui surgissent çà et là. Même si elles ne sont pas recherchées, elles sont malheureusement inévitables. Il me semble que nous vivons une « petite » crise de croissance, qui est certes importante mais qui n’est pas trop grave.

Pour le dire autrement, notre objectif est d’entrer progressivement dans un « processus de transformation missionnaire » : nous laisser transformer, renouveler par ce que nous célébrons et annonçons, sans que nous sachions encore précisément quel sera le terme de ce cheminement.

Le temps pascal qui se déploie sur 50 jours de Pâques à la Pentecôte célèbre un seul et même événement qui est à la source de notre existence et de notre foi. La veillée pascale nous aidera à nouveau à plonger au cœur de la foi.

Le Christ au centre, au cœur

Notre projet est simple : remettre le Christ au centre, au cœur de notre vie paroissiale. Je ne fais que rappeler une évidence : le centre de la liturgie n’est pas le choix des chants mais le Christ présent qui agit.

Posons-nous ces questions :

  • Qui servons-nous ?
  • Qui aimons-nous ?
  • Qui annonçons-nous  ?

Ici, nous sommes tous au service. Nous sommes en quelque sorte comme les « serveurs » au resto ; il nous revient de passer les « plats », de le faire bien, de le faire avec joie, d’autant qu’il s’agit du banquet céleste où se donne le « Pain de vie ». Nous ne travaillons pas à notre compte. Le resto ne nous appartient pas !

Qui est le premier acteur liturgique, qui est le protagoniste ? Ce n’est pas le prêtre, ce n’est pas non plus l’animateur de chants ; c’est bien le Christ et l’Esprit Saint comme nous le redécouvrirons dans la lecture du livre des Actes des Apôtres. De grâce, ne nous prenons pas pour Dieu, ne prenons pas la place du Christ ! Laissons le Christ continuer son œuvre (« opus Dei ») dans la liturgie, dans nos équipes, dans notre vie ! Acceptons de nous laisser faire ! Nous avons une seule conversion à vivre, c’est LA conversion de notre vie : passer de « nous faisons » à « nous nous laissons faire, transformer ».

L’Eucharistie « fait » l’Eglise, elle la transforme, la renouvelle de l’intérieur de la vie nouvelle du Ressuscité. Contrairement à cette expression trop souvent entendue, nous ne faisons pas l’Eglise, nous ne sommes pas aptes à « fabriquer » l’Eglise de nos seules petites mains, nous la recevons, elle nous précède comme un don de Dieu et elle continuera après nous.

Sur ce point, j’ose vous livrer mon témoignage. Personnellement, je ne suis pas le même avant et après la célébration eucharistique (sans qu’il n’y ait aucune envolée « mystique »). Je ne m’en rends pas toujours compte sur le moment, mais je réalise qu’eucharistie après eucharistie, une lente transformation se réalise en moi, en nous, qui nous transforme de l’intérieur, qui nous fait davantage devenir ensemble Corps du Christ.

  • A l’issue d’une célébration eucharistique, comment sommes-nous ?

Nous sommes « eucharistiés », i.e. transformés, renouvelés par ce que nous venons de célébrer, de vivre, par Celui que nous venons rencontrer, Celui que nous venons d’accueillir en nous. Ce n’est pas Lui qui se transforme en nous, c’est Lui qui nous transforme en Lui, qui nous unit à Lui (Pensons au chant « Devenez ce que vous recevez ». Le Christ s’est offert pour nous, pour le salut du monde ! Je témoigne que, de dimanche en dimanche, célébrer l’eucharistie avec vous me transforme ; c’est probablement l’acte qui m’engage et me transforme le plus, qui m’emmène le plus loin, bien au-delà de mes seules impressions ou sentiments.

Un appel à « plus » d’humilité

Ce qui se passe depuis quelques mois grâce au travail de la commission « liturgie » est pour moi révélateur de notre attachement à la liturgie. Seulement, de quel attachement parlons-nous ?

  • A quoi suis-je attaché ? A quoi sommes-nous le plus attachés ?

Mon service ? mes chants préférés ? notre équipe liturgique ? ma sensibilité ? mon point de vue ? ma fonction ? … Tout cela est bon. Seulement si nous voulons vivre en chrétiens, en disciples du Christ, cela ne suffit pas. Le Christ nous appelle à plus aujourd’hui, non pas forcément à faire plus de choses, mais à faire autrement. La conversion évangélique n’a rien d’une conversion de valeurs, comme on convertit des euros en dollars. Elle est avant tout une question d’amour.

Pierre à qui sera confiée une mission essentielle, s’entend interrogé à trois reprises par le Christ ressuscité : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? »

  • Et moi, suis-je par-dessus-tout attaché au Christ ?

L’attachement au Christ est le seul attachement qui ne nous rend pas esclave mais au contraire qui nous rend plus libres, plus chrétiens. La fraternité chrétienne est plus qu’une simple bande de copains.

« À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13, 35)

Une paroisse est le rassemblement de personnes d’opinions, de sensibilités, d’origines … différentes, appelées à être le Corps du Christ. Des personnes qui ne se sont pas nécessairement choisies mais qui acceptent d’être ensemble l’Eglise, qui reçoivent l’appel à témoigner de l’Amour du Christ qui dépasse leurs affinités, leurs préférences.

Etre paroisse, être ensemble l’Eglise est un sacré défi à relever dans le monde d’aujourd’hui ! Il me semble être LE défi de notre temps. Etre paroisse de la Bonne Nouvelle, être l’Eglise du Christ signifie bien plus que de chercher à entretenir ma paroisse, notre Eglise, comme s’il s’agissait de faire tourner ma boutique ou de vendre notre « fonds de commerce ».

Notre tentation est de vouloir faire (l’) Eglise, faire la liturgie, faire la messe … et même jusqu’à vouloir faire Dieu à notre image. Et là, nous basculons dans l’idolâtrie (pensons au veau d’or des Hébreux). La tentation est grande de détourner, d’inverser le projet de Dieu créateur ; ce qui revient à dire : « Faisons Dieu à notre image, selon notre ressemblance ».

Restons humbles ! Travaillons ensemble à la conversion de nos désirs, de nos intentions. Apprenons à être l’Eglise, à la recevoir, à nous laisser transformer par la liturgie, par la rencontre de Dieu. Laissons Dieu être Dieu dans notre vie, dans nos liturgies ! Remettons le Christ au centre, allons le chercher là où nous l’avons relégué (dans le placard ou le grenier) en raison de nos habitudes, de nos préférences, de nos irritations …

(Fin de l’article du bulletin de juin p.11-12)

Une expérience pascale à vivre

Pour la liturgie du temps pascal, à ce jour, il n’y a pas de calendrier établi ! Comment réagissons-nous face à l’inconnu, au vide ? Une fois de plus, la tentation serait de jouer au « bouche-trou » comme nous savons si bien le faire dans l’Eglise, continuer de gérer l’urgence, sans même prendre le temps de discerner ce qui est essentiel, prioritaire. C’est rassurant sur le moment, mais ça ne mène pas loin et ça n’attire plus personne.

Chrétiens, nous ne sommes pas devant un précipice, mais devant le tombeau vide. Le Christ vient creuser en nous le vide de sa Présence ; il nous rend acteurs, responsables, dotés de la force de l’Esprit Saint. Le Christ nous rend acteurs en se retirant, en gardant le silence, mais sans disparaître.

Dans les prochaines semaines, nous vous invitons à vivre une expérience pascale, et pour cela à lâcher prise, à renoncer à remplir immédiatement les cases du planning des équipes liturgiques. A l’image des disciples d’Emmaüs, vous serez appelés à vivre un déplacement, à vous retrouver en binôme d’équipes pour faire ce cheminement « eucharistique » : vous accueillir, partager la Parole de Dieu, vivre ensemble une célébration eucharistique puis témoigner de ce que vous aurez vécu. Dans cet esprit, des fraternités « Emmaüs » pourront voir le jour dans les prochains mois.

Je ne reviens pas ici sur les constats présentés par la commission liturgie : l’essoufflement et la dispersion, sans oublier la générosité et la disponibilité.

Lors de notre précédente rencontre des équipes liturgiques (5 février), nous nous sommes beaucoup concentrés sur la seule question du choix des chants. Nous avons eu tort ! Au-delà de la question liturgique qui nous mobilise, nous ne devons pas perdre de vue tant d’autres services à pourvoir : accueil, éveil à la foi, accompagnateur liturgique pour les néophytes ou recommençants, lien entre célébrations, lectures, communion, pot d’amitié, fleurs, sacristie, facilitateurs de relations, aménagement de l’église … Il y a tant de choses à créer, d’appels à entendre, … et nous resterions à nous battre pour une question de chants !!!

Une bonne nouvelle dont nous avons à prendre conscience : notre fragilité, notre appauvrissement n’est pas une fatalité ! Cette situation peut devenir le lieu de notre propre évangélisation, de notre véritable conversion au Christ pour arrêter de compter sur nos seules forces.

Sommes-nous prêts à faire vraiment confiance au Christ ?

Aujourd’hui, les jeunes générations nous sensibilisent à l’urgence d’une véritable conversion écologique. « Nous ne voulons plus continuer comme avant ! » s’oppose à la ritournelle si souvent entendue en paroisse : « on a toujours fait comme ça ! ».

Notre Eglise, si elle veut vivre et transmettre l’espérance, est appelée à une véritable conversion évangélique. Personne n’a envie de s’investir pour gérer le déclin, et c’est pourtant à cela que nous dépensons une grande part de notre énergie dans l’Eglise, moi le premier comme curé. Si nous restons entre nous à ressasser toujours les mêmes histoires, les mêmes soucis de boutique, nous perdons de vue l’essentiel, nous nous nous fermons aux appels à l’aide de nos contemporains et nous pourrions même finir par nous noyer dans une « mare d’eau ».

Il n’est pas seulement urgent, il est essentiel pour l’Eglise, pour notre paroisse, de nous engager dans cette transition évangélique. Perdre quelque chose de ce que nous avons, ce que nous avons fait depuis des années, pour accepter de recevoir du nouveau, que nous ne connaissons pas encore.

Où allons-nous avec ce projet « Pour un souffle nouveau » ? Nous ne savons pas complètement. C’est vrai ! Si nous n’aimons pas l’aventure, mieux vaut ne pas devenir chrétien ! L’évangile ne nous présente pas une petite vie « pépère ».

Faisons confiance au Christ qui nous entraîne avec Lui ! Acceptons simplement d’être ses disciples, de Le suivre dans le mystère pascal pour passer de la Mort à la Vie, pour ressusciter avec Lui. Pour cela, commençons par regarder lucidement notre service liturgique. Une proposition de relecture annuelle nous est faite à partir d’une charte paroissiale de la liturgie. Cette étape est indispensable si nous ne voulons pas que notre service devienne un pouvoir et que nous découragions d’autres de se mettre au service à leur manière. Offrons-nous cette liberté de (re)choisir, de dire OUI ou de dire NON, de faire une pause, d’appeler d’autres à sa suite, d’entendre la voix du Seigneur, d’entendre ce à quoi Il m’appelle aujourd’hui.

En terminant, je vous partage une conviction : ce qui nous unit est plus fort ce qui nous divise, oppose. Celui qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise.

Sources bibliographiques pour notre réflexion :

  • Emmaüs : Lc 24, 18-35
  • Lettre apostolique « Dies Domini » (Le jour du Seigneur), Jean-Paul II, 1998
  • Encyclique « Ecclesia de Eucharistia » (L’Eglise vit de l’Eucharistie), Jean-Paul II, 2003

« Charte » paroissiale de la liturgie

Quelques critères à nous donner pour être (et rester)
Une « fraternité EMMAÜS » :
Fraternité paroissiale, ouverte et missionnaire au service de la prière commune :

  • Se mettre ensemble à l’écoute de la Parole de Dieu
  • Être au moins 5 personnes par équipe
  • Prier avant l’animation de la messe (ex : prière paroissiale)
  • Assurer au moins 1 animation par mois
  • Accueillir un nouveau membre chaque année dans « notre » équipe
  • S’engager à animer au moins 1 messe dans l’année en dehors de « notre » lieu habituel
  • Service du frère : animer au moins 1 messe par an à Kergomar
  • Solliciter des personnes extérieures pour des « petits » services : accueil, quête, processions, lectures, convivialité …
  • Participer à une formation paroissiale ou diocésaine (au moins une fois par an)
  • Parrainage : Porter dans la prière une équipe d’enfants catéchisés, un futur baptisé ou un couple de fiancés.
  • Apporter de l’aide pour le chant : mariages, baptêmes, funérailles, veillée réconciliation, célébration de la Parole, éveil à la foi …
  • Chaque année, « remettre en question » son engagement au service de la liturgie