Paroisse de la Bonne Nouvelle

Eclairage – 03/11/2018 – En souvenir

Une humble pensée collée au dos d’une image de la Vierge, me ramène avec beaucoup d’émotion à une époque dont nous fêtons le centenaire en ce mois de novembre 2018. Cette pensée de 103 ans me fut donnée par mon grand-père ; elle date d'avril 1915 et vient de la plaine d’Arras. Elle ne m’a jamais quittée.

Sous le sifflement des balles

De sa belle écriture penchée, il a écrit : « Cette pensée a été cueillie par le sergent Guillou Léon, fin avril 1915, sur la plaine entre Écurie et Roclincourt, sous le sifflement des balles, face aux Boches. » Je l’imagine affrontant le danger pour garder un souvenir de ce moment et cueillant cette pensée avant qu’elle ne soit écrasée ou piétinée, pour son épouse, pour lui, pour nous qui plus de 100 ans après en faisons mémoire et nous rappelons ce lieu où la bataille a fait rage, et où un homme a combattu et risqué sa vie pour la France et pour une pensée qui a traversé le temps.

Souvenir, commémoration, devoir de mémoire…

Autant de mots que nous allons beaucoup lire et entendre en ce mois de novembre 2018 ! Après le souvenir, vient la commémoration ; plusieurs cérémonies officielles vont être organisées pour que nous conservions la conscience nationale d’un événement de l’Histoire. Un peuple se souvient et se rassemble pour conforter la mémoire collective. Les commémorations portent souvent sur des événements heureux, comme la fin d’une guerre.

On évoquera aussi le devoir de mémoire : il correspond à l’obligation morale de se souvenir d’un évènement historique tragique et de ses victimes, pour qu’une telle horreur ne se reproduise plus, par exemple la Shoah. Il est souvent fidélisé par un Mémorial, un monument érigé en souvenir, comme celui de Caen, de Verdun ou de la Shoah.

L’anamnèse

Comment ne pas évoquer dans la lignée du souvenir et du faire mémoire, un autre mémorial que nous célébrons chaque fois que nous participons à la messe ? Il prend tout son sens dans l’anamnèse le cœur de la liturgie eucharistique. L’anamnèse c’est le contraire de l’amnésie. Un amnésique n’a pas de mémoire, et faire mémoire c’est empêcher l’amnésie, l’oubli du don que Jésus nous fait de sa vie.

Ici pas de simple souvenir ni de commémoration, mais une œuvre d’anamnèse, de mémoire, à partir de la parole de Jésus dans le récit de l’Institution : Faites ceci en mémoire de moi (Lc 22, 19), qui s’actualise encore aujourd’hui : Nous proclamons ta mort Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire.

Faire mémoire est un acte qui vient de loin, on le trouve dans l’Ancien Testament : dans le Livre de l’Exode, quand Dieu révèle son nom à Moïse dans l’épisode du buisson ardent : C’est là mon nom pour toujours, c’est par lui que vous ferez mémoire de moi, d’âge en âge (Ex 3,15), et à propos de l’institution de la Pâque en Ex 12, 14 : Ce jour-là sera pour vous un mémorial.

L’anamnèse s’appuie sur un fait passé (la mort et la résurrection du Christ), en célèbre l’actualité (Le Seigneur est vraiment présent et vivant ), et annonce l’avenir (la venue du Seigneur à la fin des temps). Elle s’adresse au Christ directement : « Gloire à toi », et ne se contente pas de parler pas de lui : « Christ est venu » n’est pas une anamnèse !

Toute la dynamique de notre foi s’appuie sur la mémoire du passé pour affirmer le présent et nous ouvrir à l’espérance.

Une pensée du passé
Présence d’une absence remplie d’espérance.
Souvenir ouvert sur l’avenir
Pas la nostalgie, mais la vie !