Vous souvenez-vous ? C’était il y a tout juste deux ans, un samedi soir après l’équinoxe de printemps, la veille du dimanche qui suit la première lune de printemps…
Un feu était allumé devant les églises à la tombée de la nuit, des chrétiens rassemblés fêtaient la lumière et un grand cierge allumé à ce feu était porté souvent par un diacre. Celui-ci proclamait d’une voix forte sur trois tons différents en entrant dans une église sombre : « Lumière du Christ l » On répondait : « Nous rendons grâce à Dieu ! » Chacun des participants rentrait à sa suite et se donnait l’un à l’autre la lumière venue du cierge allumé au grand feu.
C’était la nuit de Pâques d’avant la Covid 19 et le couvre-feu, la grande nuit pour les chrétiens qui célèbrent Jésus ressuscité devenu Christ dans son passage de la mort à la vie, c’était la célébration par excellence du mystère pascal, c’était la fête de la lumière !
C’était… mais c’est encore, même si à l’heure où j’écris, tout laisse présager d’une Pâque sans la Vigile pascale au cours de laquelle se lisent les récits de l’histoire du Peuple de Dieu, s’écoutent psaumes et chants de joie, et qu’éclate l’Alléluia enfermé pendant quarante jours dans le désert de nos voix, pour dire que Christ est ressuscité. C’était… mais c’est encore, la fête de la lumière par excellence, celle qui brille dans les ténèbres.
Au premier récit de la Création en Genèse 1, la lumière est l’élément qui apparaît en premier. « Au commencement Dieu a créé la lumière ». « Et Dieu dit : “Que la lumière soit !” et la lumière fut. ” Ce fut le premier jour. » (Gn 1, 3-5).
La lumière, première œuvre de Dieu. Sa création a précédé celle du soleil qui n’arrive que le quatrième jour. Des ténèbres qui envahissaient la terre et qu’il appela « nuit », a jailli la lumière qu’il appela « jour » (v. 5). Le mot soleil n`est même pas évoqué dans la Genèse qui parle de « grand luminaire » (v. 16).
Dans les versets 3 à 5, on trouve cinq fois le mot « lumière ». La tradition juive y voit les cinq premiers livres de la Bible, la Torah ou Pentateuque qui seraient cette lumière accompagnant le peuple de Dieu et l’enseignant.
Les prophètes annoncent la lumière qui vient, le plus connu est Isaïe ; « le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière » (ls 9, 2). Les psaumes l’évoquent aussi, le Ps 104 parle de Dieu « drapé de lumière comme d’un manteau » et le Ps 36 dit « Par ta lumière nous voyons la lumière ».
La lumière figure aussi en bonne place dans le Nouveau Testament : ce n’est pas par hasard que Jésus guérit des aveugles l Retrouver la vue c’est voir la lumière. Les disciples du Christ sont appelés à être « la lumière du monde »
Mais s’il est un évangile qui met en avant le thème de la lumière, c’est bien celui de Jean. Le Prologue qui commence par les mêmes mots que le récit de la création : « Au commencement », va droit au but : ses premiers versets établissent un lien direct entre la Parole de Dieu, la vie et la lumière. C’est dans cet évangile que l’on trouve, et de loin, le plus grand nombre d’occurrences du mot lumière.
Jean nous dit que cette lumière du Commencement a un nom : le Verbe. « Et le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous », c’est Jésus la « vraie lumière », celle du Commencement, la nouvelle Torah, et le fait de croire en lui fait accéder à la lumière. Les ténèbres, dès lors, sont le domaine de ceux qui refusent de croire.
« Joyeuse lumière, Splendeur éternelle du Père, Saint et bienheureux Jésus-Christ ! »
C’est la plus ancienne hymne chrétienne chantée à la tombée du jour en l’honneur du Christ lumière, pendant la prière du lucernaire qui signifie allumage des lampes. Chantée le soir du Sabbat par nos frères Juifs, cette hymne a trouvé sa place chez les chrétiens depuis le Concile Vatican II avant l’office de vêpres ou de complies le samedi.