Paroisse de la Bonne Nouvelle

Eclairage – 01/04/2019 – Allegria !

Une exposition, le tableau d’une guitare aux cordes éclatées, un titre : Allegria !

Allegria ! Allégresse ! Un mot qui fuse comme un éclat de rire !
Alors que je cherche à exprimer la joie de Pâques et ce que signifie pour moi la Résurrection du Christ, c’est avec surprise et étonnement que s’imposent à moi l’image d’une de mes guitares découverte un matin les cordes éclatées, et un tableau vu dans une exposition il y a plus de vingt ans.

Comment crier de joie devant une telle découverte ? Tous les guitaristes seront de mon avis ! Aragon chanté par Ferrat dans Que serai-je sans toi ? dit bien mon ressenti de l’époque. Qui parle de bonheur a souvent les yeux tristes. N’est-ce pas un sanglot de la déconvenue, une corde brisée aux doigts du guitariste… Tristesse, sanglot, déconvenue…

En évoquant ce souvenir, les mêmes sentiments m’envahissent encore aujourd’hui, et je réalise soudain qu’Il est plus facile de parler de Résurrection quand le printemps arrive, quand tout va bien, que lorsqu’on est dans la tristesse ou qu’on vient de voir des films montrant celles qu’on appelle Les invisibles , ceux qui amènent au Sacrement de la tendresse, ou les enfants bafoués de Grâce à Dieu !

Ressusciter, se lever, être debout, ces mots ont le même sens. Comment les vit-on quand on est terrassé par la misère et la souffrance ?

Gemmanick

Sans le savoir, elle fait partie de ces gens qui ont jalonné ma route et marqué ma vie. J’ai rencontré cette artiste néo-calédonienne lors d’une exposition de ses œuvres, parce que je suis tombée en arrêt devant un tableau représentant une guitare éclatée comme la mienne, et que sous le tableau un mot m’a bouleversée : « Allegria ! ». Comment parler d’allégresse devant une guitare qui ne peut plus vibrer ? Comment parler d’allégresse devant un corps brisé ? À ces questions, la réponse de Gemmanick a jailli : « Mais pour moi c’est ça la Résurrection ! »

La Résurrection, un corps qui éclate ? Des cordes qui sautent ? Une musique qui se tait ? Une guitariste sans guitare ?

Avec Gemmanick j’ai soudain réalisé que la Résurrection ce n’était pas des mots, de la philosophie, une idée… La Résurrection du Christ n’est-elle pas née du corps brisé de Jésus sur la croix ? N’a-t-elle pas jailli du doute de Thomas, du désespoir des disciples d’Emmaüs ? Comment ne pas voir dans les visages des trois films cités plus haut, et dans les ressources insoupçonnées trouvées en eux, des signes de Résurrection ?

Dans son homélie du 17 février dernier le père Dominique évoquait notre difficulté à croire à la Résurrection parce que nous n’en avons pas de représentation. La Résurrection, dit-il, c’est le bout et le but du chemin que Jésus est venu nous ouvrir, et le chemin c’est Jésus lui-même : Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. (Jn 14, 6)

Il est grand le mystère de la foi !

La Résurrection est une réalité qui ne se décrit pas, elle se vit. Jésus ressuscité n’a pas d’autre corps visible que le nôtre. C’est en ressuscitant que Jésus devenu Christ nous entraîne dans la gloire de la Vie éternelle en faisant éclater notre notion de l’espace et du temps.

Alors oui, Gemmanick, vous avez raison. D’une guitare éclatée d’avoir trop vibré peut jaillir un chant de résurrection parce que Pâques c’est la victoire de la Vie sur nos échecs et nos blessures, dans la vie de tous les jours.