Tout d’abord, lorsque vous vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions, me dit-on, et je crois que c’est en partie vrai : il faut même qu’il y ait des scissions parmi vous afin qu’on voie ceux d’entre vous qui résistent à cette épreuve.
Quand croyez-vous que cette phrase fut écrite ? Au lendemain des manifestations de résistance de certains catholiques pour avoir « leur messe » ? Certes non ! elle date de l’an 54 et à été écrite à Éphèse par l’apôtre Paul s’adressant aux chrétiens de Corinthe (1 Cor 11, 18-19). En effet, dans cette communauté où il a vécu de 50 à 52, les divisions sont grandes. Alors que fait Paul dans sa lettre ? Il recentre les Corinthiens sur la figure de Jésus-Christ ressuscité. Le Christ dit Paul, ne peut être ni divisé, ni confessé par une communauté désunie. C’est dans ce chapitre que nous devrions méditer par les temps qui courent, que Paul fait le plus ancien récit de l’Institution de l’Eucharistie à partir du verset 23, pour inviter ses frères de Corinthe à célébrer le repas dans l’esprit voulu par le Seigneur.
Cette parole de Jésus en Jn 17, 21, choisie comme thème du premier bulletin de l’année, m’est souvent venue à l’esprit en observant ce qui s’est passé dans les tensions vécues entre ceux qui souhaitaient respecter les mesure sanitaires imposées par un virus tenace, et ceux qui voulaient « leur messe » à tout prix faisant fi des restrictions imposées pour la santé d’autrui : faisions-nous partie de la même Église ? Comment en sommes-nous arrivés à nous diviser sur notre rapport à l’Eucharistie et la communion au corps du Christ par laquelle nous devenons unis en lui ? Loin de moi l’idée de vouloir juger et de la jauge et des jaugés ! Si je suis toujours émue devant une manifestation de la foi populaire comme celle vécue dans nos pardons, ou celle de la messe de Noël qui ramène quelques catholiques distancés à des valeurs qu’ils n’ont pas perdues, celle-ci m’a attristée et peinée parce que la messe n’est pas un « dû », elle est « don » !
Faire corps contre le Covid, faire corps contre la misère ou l’injustice, voilà bien une cohésion qui ne fait pas mentir l’image du corps utilisée par Paul dans cette même lettre aux Corinthiens : vivre ensemble demande de s’accepter aussi différents que l’oreille et la main qui pourtant font partie d’un même corps.
Faire corps dans notre paroisse, dans nos églises… Comment faisons-nous corps à la messe ? Y venons-nous pour rendre un culte à un Dieu lointain et être en bon terme avec lui ? Y allons-nous pour y chercher de l’énergie, du repos, chacun pour soi ? : « ça me fait du bien »… Pour retrouver les habitués d’un club agréable et des visages familiers ? Nous demandons-nous quel « saint sacrement » nous sommes et nous devenons dans et par nos eucharisties ?
Autant de questions pertinentes que ces évènements laissent à ma méditation pour la semaine de l’unité des chrétiens du 18 au 25 de ce mois. Si cette semaine se veut prière pour l’unité des chrétiens dans le monde, faisons-là aussi prière pour notre unité dans une même paroisse.
Faire eucharistie c’est faire entrer Jésus-Christ ressuscité dans notre vie, c’est se mettre en marche à sa suite dans la confiance et l’espérance parce que notre foi ne s’appuie que sur le mystère pascal. Communier c’est accepter de devenir personnellement et communautairement le Corps du Christ. Mais la présence réelle n’est pas qu’eucharistique, l’Écriture et la rencontre du frère le sont aussi. Et puis comment en ce temps de manque eucharistique ne pas penser à ceux qui en sont privés ?
2020 : annus horribilis… résisterons-nous à l’épreuve comme l’écrit Paul ? Nous savons grâce à l’espérance qui nous habite, que d’une crise naît souvent du neuf ! Pour ma part je forme le vœu que, nous appuyant sur les trésors de la liturgie, nous arrivions en 2021, à célébrer joyeusement et dans la paix, dans une fraternité bienveillante.
Doue araok ha nimp war lerc’h ! Bloavez mat d’an holl !
Dieu avant et nous après ! Bonne année à tous !