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Mot d'accueil d'Yves Le Bever

Bonsoir à tous

C’est avec une immense joie que nous nous rassemblons aujourd’hui pour célébrer le cinquantième anniversaire de notre Église Saint Yves, ici à Ker Uhel, en présence de notre évêque Denis Moutel, qui nous fait l’honneur de présider cette messe anniversaire. Malgré, j’imagine, une certaine fatigue comme beaucoup d’entre nous revenus de Lourdes hier soir après un très beau pèlerinage, plein de rencontres, d’échanges et de prières sous le regard affectueux de la vierge Marie.

C’est en tant que président de l’association des paroissiens de saint Yves que je m’adresse à vous aujourd’hui. Cette association qui a vu le jour en 1974 avant même l’inauguration de la première église saint Yves et qui a joué un rôle essentiel dans l’histoire mouvementée de notre église, mais j’y reviendrai. Alors remontons un peu le temps

En 1962 la ZUP de Ker Uhel voyait le jour pour accueillir les nombreux habitants attirés par l’implantation du CNET, le Centre National d’Études des Télécommunications à Lannion. Nous lannionnais de souche, avons vu débarquer tous ces parisiens trainant les pieds, imaginez : quitter Paris et venir au fin fond de la Bretagne à Lannion une petite ville, chez les ploucs… comme ils nous dénommaient affectueusement à l’époque…L’osmose n’a pas été immédiate, mais on constate aujourd’hui qu’ils sont tous installés définitivement dans le Trégor et ont aucune envie de retourner à Paris. Donc un gros changement dans la population lannionnaise et changement personnel pour moi, puisque dans ces nouveaux arrivants se trouvait celle qui allait devenir mon épouse.

Mais revenons à notre histoire,  En 1966, suite à cet accroissement de la population sur Ker Uhel la paroisse de Saint Roch était fondée, avec l’abbé Alexis Le Coniat comme premier prêtre. L’abbé Charles Le Meur, affectueusement surnommé « tonton Charles », lui a succédé, accompagné de son adjoint Maurice Gauthier. Ensemble, ils ont su tisser des liens profonds avec les habitants, partageant leurs joies et leurs peines dans un appartement HLM, rue du Muguet où ils résidaient.

Mais la chapelle Saint Roch est trop petite pour accueillir tous ces nouveaux paroissiens et en 1969, l’évêché de Saint Brieuc fait l’acquisition d’un terrain de 3000 m², posant ainsi les bases de notre centre paroissial. L’architecte Albert Le Corre a conçu un espace polyvalent, répondant aux besoins d’une communauté en pleine expansion. Les travaux ont débuté en juin 1973, et le 27 octobre 1974, sous la présidence de Monseigneur Kervéadou, nous avons célébré l’inauguration de notre église St Yves.

L’abbé Yves Nicolas, le poète dont vous trouverez un recueil de son œuvre préfacé par l’abbé Guy Marzin dans la salle d’exposition, est arrivé de Bréhat en 1979 pour succéder à Charles Le Meur. Lui aussi habitait dans l’appartement HLM au milieu de ses paroissiens. Il était présent la funeste nuit du 20 au 21 décembre 1983, où un incendie d’origine électrique a complétement détruit l’église. Les paroissiens, profondément affectés, ont su faire preuve de résilience, célébrant l’office de la nativité dans le gymnase de l’ASPTT, témoignant ainsi de leur détermination et de leur foi, même dans l’adversité. Les dégâts estimés à 2,5 Millions de Francs furent heureusement pris en compte par l’assurance et il fut décidé de reconstruire l’église. Ainsi, le 22 décembre 1985, la nouvelle église a été inaugurée deux ans après cette tragédie, sous la présidence de Mgr Kervennic.

L’abbé Yves L’Héréec succéda au père Nicolas en 1989. Malheureusement après 3 ans à la tête de la paroisse il décéda brutalement dans son appartement rue Sully Prudhomme le 26 janvier 1992. Il fut le dernier recteur de la paroisse Saint Yves, qui fut alors rattachée à la paroisse de Lannion.

Aujourd’hui, nous célébrons non seulement l’édifice en lui-même, mais surtout la communauté qui l’anime. Notre église est véritablement une église de pierres vivantes, car elle est habitée par chacun d’entre vous, ces paroissiens engagés qui, depuis des décennies, nourrissent notre foi et notre vie communautaire. Grâce à votre fidélité et à votre dévouement, le relais Saint Yves est resté vivant et dynamique, accueillant des activités variées en dehors des célébrations : catéchèse, kermesses, conférences, Fest Noz, repas et tant d’autres rencontres qui renforcent nos liens.

Je tiens tout particulièrement à remercier ici tous les membres de l’association des paroissiens de saint Yves. Cette association a été créée en juin 1974 afin de contracter un emprunt pour acheter le mobilier nécessaire au fonctionnement du centre paroissial. Une kermesse annuelle a été instituée pour rembourser cet emprunt et la première a eu lieu le 6 octobre 1974 avant même l’inauguration de l’église le 27 octobre.

Cette association, dont l’objectif était de gérer les finances et l’entretien de notre paroisse, existe toujours aujourd’hui. La kermesse est devenue kermesse paroissiale et tous les ans nous récoltons plus de 10 000 € que nous versons à la paroisse grâce à la générosité et à l’implication de tous.

Cette association est une formidable aventure humaine, je vois ici de nombreux membres présents dès le début de cette aventure, toujours fidèles et actifs, d’autres malheureusement nous ont quittés. Cette chaine fraternelle dont chacun et chacune d’entre vous ont été et sont toujours des maillons forts depuis 1974 a permis de construire l’histoire de cette église que nous fêtons aujourd’hui. Un grand merci à tous présents et absents.

La seule ombre au tableau, sans vexer personne, est que ces jeunes couples trentenaires qui ont créé et développé notre église saint Yves il a 50 ans arrivent aujourd’hui ou dépassent l’âge canonique de 80 ans et que nous avons beaucoup de mal à trouver leur relève. Alors ils continuent vaillamment sans se plaindre. Aussi, comme dans de nombreuses paroisses nous sommes à la recherche de jeunes bénévoles prêts à s’investir pour poursuivre le chemin. Mais restons confiants en cette année jubilaire placée sous le signe de l’espérance.

De même, après cinquante ans de bons et loyaux services, il est temps d’envisager la rénovation de notre centre. Une réflexion est en cours pour lui donner une nouvelle jeunesse, afin de répondre au mieux à l’ensemble des besoins de notre paroisse de La Bonne Nouvelle. C’est un sujet important qui nous tient à cœur ici à saint Yves et nous le suivons de près.

Alors, en ce jour de célébration, rendons grâce pour tout ce que nous avons vécu ensemble, pour les moments de joie, de partage et de solidarité. Que ce cinquantième anniversaire soit une invitation à poursuivre notre chemin ensemble, à bâtir, non seulement des murs, mais des relations, des liens d’amour et de fraternité au sein de notre communauté.

Merci à tous, et que Dieu bénisse notre Église Saint Yves et chacun d’entre nous.

Yves Le Bever

Président de l'association des paroissiens de Saint-Yves

Mot d'accueil de Mgr Denis Moutel


Chers frères et sœurs,

Je suis heureux de vous rejoindre pour le cinquantenaire du centre cultuel Saint Yves. Avant de commencer notre célébration et de revenir au quartier de Ker Uhel, permettez-moi de dire un petit mot d’introduction avec deux événements, celui qui vient de toucher Gabriel, votre curé, et puis un événement de l’Eglise universelle.

  • Je veux d’abord redire ma proximité d’amitié et de prière au père Gabriel Housseini après le décès de son frère Michel, que nous avons appris à Lourdes. Dieu a œuvré dans la vie de votre frère, qui avait de grandes responsabilités. Il continue en lui ce qu’il a commencé. Toute notre amitié, Gabriel.
  • Demain dimanche, deux canonisations : Il y a 100 ans et 20 ans. Pier Giorgio Frassati, 1901-1925 (+ 24 ans) ami des pauvres à Turin, saint patron des montagnards. Et Carlo Acutis, 1991-2005 (+ 15 ans) apôtre du numérique. Deux figures complémentaires, exemples pour les jeunes.

Nous fêtons les cinquante ans de notre centre cultuel. Le titre même indique la préoccupation de l’enracinement dans le quartier et dans la vie chrétienne, de l’engagement dans la vie du monde et du ressourcement dans l’Evangile, la Parole de Dieu et les sacrements.

Il s’agissait de « faire vivre l’Eglise au cœur du quartier ». La solidarité a été grande d’ailleurs au moment de l’incendie de la première église le 21 décembre 1983. La messe de Noël a pu être célébrée dans la salle de l’ASPTT.

Homélie

Pour bien choisir, pour bien construire, nous dit l’Evangile, il faut commencer par s’asseoir. Et Jésus prend deux petites paraboles. Celle de l’homme qui veut bâtir une tour, et celle du roi qui part en guerre ; leurs leçons se ressemblent. Oui, quand on veut bâtir une tour, il faut commencer par réfléchir et savoir ce que l’on veut vraiment. C’est ce qui s’est passé ici, avec un véritable projet d’enracinement dans le quartier, à la mesure de la croissance économique et démographique de la ville.

Celui qui marche à la suite du Christ doit aussi s’asseoir, se recueillir, réfléchir. Mais il sait qu’il peut compter, au-delà de ses seules forces, sur le don de Dieu.

S’asseoir pour accueillir le don de Dieu.

Nous l’avons entendu au livre de la Sagesse. La Sagesse, au sens biblique, c’est la connaissance de ce qui rend heureux ou malheureux, un art de vivre pour choisir l’essentiel. « Mais, qui peut découvrir les intentions de Dieu ? » dit le sage.

Qu’est-ce qui va apporter du bonheur, cette année, pour les autres, pour le monde, pour nous, pour moi. Dans la Bible, dans le récit des promesses de Dieu, il y a un point décisif :

Quand l’homme prétend faire tout seul son bonheur, il s’engage immanquablement sur des fausses pistes : c’est la leçon du jardin d’Eden.

Il est intéressant de constater que cette relativisation des connaissances de l’intelligence humaine se développe dans le milieu le plus intellectuel qui soit : le livre de la Sagesse a été écrit à Alexandrie, grand port de la Méditerranée et la plus grande ville du monde grec, juste avant Jésus Christ. C’était certainement la capitale de l’intelligence. Les disciplines scientifiques et philosophiques y étaient très développées et la bibliothèque d’Alexandrie est restée célèbre. C’est à ces grands esprits que l’auteur croyant vient rappeler les limites du savoir humain : « Les réflexions des mortels sont incertaines, et nos pensées chancelantes. »

Mais Dieu lui-même nous révèle ce que nous ne découvrons pas tout seuls. Il nous donne son Esprit : « Qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? »

Autrement dit, il faut inviter aujourd’hui l’Esprit Saint à nos réflexions, il faut l’associer à nos projets. Car l’Eglise n’est pas une organisation ou une structure morte. Elle est vivante et fidèle si elle accueille l’Esprit Saint, dans l’écoute de la Parole de Dieu. C’est lui qui ouvre nos intelligences et nos cœurs. Il nous rend libres, il nous fait entrer dans des comportements nouveaux à la suite du Christ. Il nous fait entrer dans un autre regard sur les autres.

Construire nos projets dans le respect et l’amour des autres

Dans ce temps de rentrée scolaire, professionnelle, pastorale, nous sommes invités à construire nos projets et nos relations de manière ajustée.

La deuxième lecture, la lettre à Philémon, en donne un bel exemple. C’est une toute petite lettre : 50 versets, 50 lignes au maximum. Paul est en prison, son correspondant est probablement un homme important, dont l’attitude compte aux yeux des autres. Il s’appelle Philémon, il est chrétien.

Il avait un esclave, Onésime, qui s’est enfui de chez lui, ce qui était totalement interdit en droit romain. Un esclave appartenait à son maître comme un objet ; il ne pouvait disposer de lui-même, et la fuite même était sévèrement châtiée.

Au cours de son escapade, Onésime a rencontré Paul et il devient chrétien.

Ce que Paul suggère à Philémon, c’est une véritable conversion : désormais, puisqu’ Onésime est baptisé, il est un frère pour toi :

Autrement dit, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a que des baptisés ; le baptême a fait de nous des frères et soeurs en Jésus-Christ.

Il y a là un enseignement très fort sur le Baptême : désormais le baptisé n’est pas d’abord noir ou blanc, français ou étranger, patron ou employé, homme ou femme… il est d’abord un frère, une sœur, un autre membre du Corps du Christ. Je peux ne pas être d’accord avec toi, avoir des différends, mais je demande la grâce de te regarder comme un frère, une sœur.

Cela vaut pour toutes les personnes que nous rencontrerons au cours de cette année pastorale : dans nos projets, dans nos choix, faisons-leur une grande place, regardons-les comme des frères et sœurs qui sont confiés à notre attention, regardons-les comme des personnes à aimer.

+ Denis Moutel

évêque de Saint-Brieuc et Tréguier