Frères et sœurs, depuis mardi dernier, nous sommes sous le choc face à l’ampleur du drame révélé par la Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Eglise ; face à toutes ces vies brisées, nous sommes consternés.
Dans cette situation, nous avons d’abord à faire silence pour entendre ceux qui n’ont pas été entendus ou écoutés : le cri, la détresse des sans-voix, des victimes. Dieu nous parle à travers eux. Apprenons à écouter l’autre même si cela dérange.
Si le silence a pu être une stratégie d’étouffement employée pour éviter les remous et protéger l’institution « Eglise », cette attitude n’est plus acceptable !
Nous avons aussi besoin de silence pour discerner, pour reconnaître ce qui va et ce qui ne va pas. L’Eglise va mal, mais « tout n’est pas pourri » ; nous en sommes témoins au quotidien. Apprenons à nommer le mal, sans oublier de nommer le bien, en ayant d’abord le souci des personnes. Accompagnons nos frères et sœurs éprouvés dans une réelle démarche de reconstruction en exigeant que la vérité soit recherchée dans l’amour.
Humblement, engageons-nous dans cette œuvre de discernement avec d’autres, pour y voir plus clair sur nous-mêmes, sur l’Eglise et sur le monde qui nous entoure. Sollicitons l’aide des autres. L’Eglise est appelée à sortir de sa « bulle », à commencer par les évêques et les prêtres, pour accepter de nous laisser aider, lorsque nous ne savons pas ou que nous avons failli. Certes, l’Eglise possède des ressources en elle-même, mais cela ne suffit pas.
Comme curé, membre de l’Eglise, je sollicite votre aide pour avancer dans ce discernement en paroisse. Comme baptisés, animés par l’Esprit Saint et riches de vos dons propres, vous avez la pleine capacité à apporter votre contribution à la conversion de l’Eglise.
Dans ce contexte éprouvant, nous sommes assaillis par bien des questions sur la crédibilité de l’Eglise, sur sa capacité à se réformer en profondeur. Peut-être même, pouvons-nous être tentés de quitter la barque de l’Eglise. Certains ont choisi de prendre du recul discrètement, se disant : « Je ne me reconnais plus dans cette Eglise dont l’institution a failli, alors je m’en vais ».
Ce n’est pas à moi de vous dire ce que vous avez à faire, mais permettez-moi de vous partager fraternellement ce qui m’anime. Comme baptisé, je suis membre de l’Eglise catholique ; comme prêtre, je fais partie de ce que nous appelons l’institution. Malgré ses erreurs, j’ose affirmer que j’aime l’Eglise ; je lui dois beaucoup. Mais parce que je l’aime, je veux qu’elle change, qu’elle se convertisse, qu’elle s’ouvre. Comme baptisé et prêtre, je souhaite y prendre ma part, avec vous.
Alors, ne démissionnons pas !
La mission des baptisés est essentielle !
Pas pour faire tourner la boutique ou rendre service à Monsieur le Curé, mais pour accomplir ensemble la mission confiée par le Christ à l’Eglise : vivre et annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, venu pour servir et non pour être servi.
Le plus grand service que nous ayons à rendre au monde, c’est d’assumer notre mission de chrétiens, de l’assumer humblement, passionnément : en aimant, en priant, en vivant et en partageant notre foi. Voilà ce qui peut apporter la joie véritable !
La crise que nous traversons peut devenir un appel à revenir aux sources, à une vie plus évangélique, plus fraternelle qui rayonne de l’Amour de Dieu pour notre humanité.